Les murales de Montréal, l’art dans la cité
N’étant pas un spécialiste de l’art urbain, street art pour les intimes, j’ai eu besoin au moment de rédiger cet article de me documenter sur cette nouvelle discipline. La source première de ce propos introductif est un livre d’Olivier Landes, Street Art Contexte(s), publié chez Gallimard dans la collection Alternatives.
Je le cite : « Le développement du street art est assurément l’un des phénomènes majeurs de l’histoire récente de l’art contemporain. Il est ancré dans son temps, spontané, photographique et viral. (…) Son succès s’explique également par son caractère hybride : il conjugue l’univers de la rue avec celui de l’art (street + art), originellement éloignés. Les œuvres urbaines ouvrent des fenêtres poétiques dans des villes prosaïques. »
Olivier Landes poursuit : « Alors que, dans les lieux habituels d’exposition, l’œuvre est montrée pour elle-même, dans un environnement volontairement neutralisé pour donner toute la place à l’art, l’œuvre d’art urbain, elle, jouit d’une mise en contexte systématique. Et lorsque le site est spectaculaire ou que la mise en contexte est parfaitement pensée, elle prend alors une toute autre dimension (…). »
Voyons cela de près…
Le Street Art, une appropriation de la ville
Commençons par l’enfant du pays, Leonard Cohen. Un héros, un héraut montréalais. Dont le portrait quasi photographique orne le pignon d’un des grattes-ciels du centre ville. Visible, comme le nez au milieu de la figure, du Mont Royal ! Vous voulez vérifier ? Revenez alors à l’article précédent, « Montréal, une ville française ? » pour vérifier mes dires, et examinez la première photo…
Leonard Cohen, personnage singulier. Humaniste cérébral et tourmenté, mystique aux multiples égéries, amies et amoureuses… Grand dépressif devant l’Eternel, comme a su le traduire le street artist Kevin Ledo. Mais quel personnage, quel poète !
Mais revenons-en aux citations des premières lignes de cet article, un peu plus haut. Avec un exemple, je voudrais illustrer la manière dont l’angle de vue change la perception de l’œuvre. Commençons par remonter le boulevard Saint Laurent, et admirons depuis la chaussée le travail de Shepard Fairey.
Maintenant, passons par l’arrière d’un bloc urbain dans une rue transversale proche, et recherchons le regard direct de cette femme. Que comprendre de cette intrication d’images et de lignes ? Pour moi, la question reste en suspens. Même si une conclusion s’impose : il est difficile de séparer la murale de son environnement.
Les murales sont partout. Et même, certains artistes tentent la transformation de la façade d’un immeuble en une fresque géométrique. Personnellement je n’adhère pas, est-ce vraiment du street art ? Mais à chacun de se faire un avis…
Une chose est en tout cas certaine, les fresques sont partout dans la ville, et seuls les nouveaux arrivants, les touristes s’arrêtent pour les contempler, les montréalais les ont totalement intégrées dans leur cadre de vie.
C’est le décor dans lequel s’installe la vie. On marche, on s’assied, on prend le soleil, on téléphone…
Mais, comme en France, et cela m’attriste alors que d’autres acceptent volontiers ces transformations, ces œuvres (le street art en produit de superbes) sont parfois taggées par des sous-artistes qui les dénaturent au point de leur faire perdre leur équilibre esthétique. Cela aussi, c’est la vie…
Toutes ces œuvres n’ont pas pignon sur rue. Parfois c’est pignon sur ruelle ou courette ! Il devient alors difficile de prendre suffisamment de recul pour admirer le tableau dans son ensemble. Comme dans le cas de cette murale de Jeremy Shantz.
Arrêtons cette première séquence consacrée à l’art mural de Montréal avec une œuvre un peu inquiétante. Dans la cour d’un immeuble industriel logé dans une rue peu fréquentée, on aimerait comprendre cette fresque sans couleur, mais non sans dimension. Roa est un spécialiste des rats géants, il décrit sa démarche comme une thérapie. Je veux bien le croire.
La seconde partie de ce article est programmée pour bientôt ou un peu plus tard… Restez en ligne !