Pourquoi cela ? Pourquoi un autre angle ? Cela remonte à loin…
Durant mes études j’avais travaillé pour l’OFQJ (l’Office Franco-Québecois pour la Jeunesse), accompagnant des groupes de canadiens francophones durant leur séjour chez nous. Depuis je n’avais plus jamais participé à un voyage organisé, l’expérience était utile pour le financement de mes études, mais je préférais voyager à ma manière et regarder le monde sous un autre angle.
J’avais donc dit, « Fontaine, je ne boirai pas de ton eau ». Je me suis repenti… Nous sommes de retour, il y a à peine plus d’une semaine, d’un périple en groupe , en Israël et dans les Territoires Occupés. Un court voyage, dense, intense, fort. Et cette fois en tant que simple participant… De l’autre côté du miroir on voit les choses sous un autre angle. Pas inintéressant sur le plan sociologique, en tout cas.
En tout cas, le fait d’être passé de l’autre côté de l’écran ne m’a pas fait changer de manière de photographier. J’ai bien sûr emmagasiné des images de voyage classiques, mais toujours attiré par l’insolite, l’inattendu, j’ai pu prendre du recul et en décalant du groupe voir l’aventure sous un autre angle.
Israël est un pays occidental ?
C’est un peu l’impression que l’on a lorsqu’on débarque de l’aéroport, direction notre premier hôtel à Tel-Aviv. Impression renforcée le lendemain matin, en montant dans le bus qui va nous transporter durant tout notre voyage, lorsque je découvre le paysage urbain si semblable aux villes européennes du bord de la méditerranée. L’alphabet des publicités et indications routières n’est pas le nôtre, mais à part cela…
Un autre angle : une publicité, une vitrine de magasin, des détails
Et tout de suite, une première interrogation. Que signifie cette affiche lumineuse géante pour une marque de fast-food bien connue ? Est-ce une manière de dénoncer la qualité des produits de cette chaîne de restauration ? De rappeler que la crise du Covid, pas encore complètement effacée, a fortement pénalisé les consommateurs de malbouffe ? Ou encore est-ce une allusion politique au fait que la société israélienne ne permet pas toujours l’expression de certaines minorités ? Pas de polémique, l’objet de notre voyage n’est pas là. La question reste sans réponse.
Le bus démarre. Nous parcourons au tout petit matin les rues de la ville. Nous traversons sans voir grand chose le quartier classé par l’Unesco au titre du mouvement Bauhaus, bien défraîchi. Des rues, des voitures, des piétons, des magasins. Peu d’animation, il est trop tôt, les gens partent au travail, comme sans doute ce cycliste saisi dans les reflets de la vitrine d’un magasin de chaussures. Foot Locker, image fugitive mais pas vraie ment typique.
Nous le découvrirons au fil de ce voyage, Israël n’est certainement un pays champion en matière d’écologie et de recyclage. Si la façade est bien propre, comme partout des détails signifiants montrent bien que, comme ailleurs, on a tendance à simplement camoufler, à glisser sous le tapis ce dont on veut se débarrasser. Ceci sans aucune allusion aux affaires politiques qui agitent la société israélienne, bien sûr.
Mais il y a aussi en Israël, au delà de ces comparaisons avec nos propres travers, de très belles choses, des paysages splendides, des lieux apaisants, des œuvres d’art remarquables. Nous le découvrons au fil du périple,..
Dont les vitraux de Marc Chagall à la synagogue de l’hôpital Hadassah de Jérusalem. Immense était la satisfaction ressentie en contemplant, pour un temps trop court, les magnifiques vitraux consacrés aux 12 tribus d’Israël. Parmi ceux-ci, une œuvre lumineuse, symbolique, mystique, la tribu de Levi : il fallait en choisir une, toutes sont remarquables.
Comme pour les onze autres vitraux de cette synagogue, l’artiste a parsemé son vitrail de symboles liés à la vie du fils de Jacob évoqué dans le verre.
Une approche de la religion en Israël. Mais seulement un début.
Car l’essentiel de notre voyage a été consacré, comme on pouvait s’y attendre, au patrimoine géographique, culturel, monumental, historique et religieux d’Israël.
Avec une surprise de taille, en ce qui me concerne. Avant notre départ, et au regard de la densité du programme annoncé, je m’imaginais Israël comme un vaste pays, où nous aurions bien des trajets à effectuer pour aller de site en site.
Quelle erreur. Les distances sont courtes, les époques se chevauchent, et les monuments s’empilent les uns sur les autres, voire les uns dans les autres, comme au saint Sépulcre. Tout est imbriqué, voire intriqué… Tout est lié, tout vient du même lieu, des mêmes ressources et de la même eau, des mêmes personnes. Pourtant tous ces frères et cousins se sont fait et se font la guerre au titre d’une histoire et d’un livre partagé. Quel non-sens !
La mosaïque religieuse et la ferveur des pratiquants
Nous sommes sur l’Esplanade des Mosquées. Il fait bon, le soleil est déjà haut. Un premier regard sur l’animation religieuse du lieu, avec ce lecteur du Coran paisiblement installé sous un arbre , indifférent à ses concitoyens et aux touristes (nombreux !) tout autour.
Plus loin, au Mur des Lamentations, ce sont des juifs qui viennent prier et embrasser les pierres de ce qui reste apparent du Temple de Salomon. Une ferveur beaucoup plus démonstrative, mais la même indifférence à ce qui entoure les croyants.
En un autre endroit de Jérusalem, sous le Mont des Oliviers, le site de Gethsémani est plus spécifiquement chrétien, mais de différentes confessions : catholique, orthodoxe… La ferveur étreint aussi les pèlerins venus découvrir les lieux saints.
Au cours de ce voyage, nous avons pu voir, depuis Qasr Al-Yahoud, Béthanie, le lieu où Jean-Baptiste a baptisé le Christ. Certains pèlerins d’un autre groupe, américain en l’occurrence, ont renouvelé leur baptême en se plongeant dans l’eau du Jourdain. Il faut avoir la foi, de mon point de vue, pour se baigner dans une eau bien peu courante. Je ne dois pas être assez croyant : sans regret !
Nettement plus classe, le baptême dans l’Église de la Nativité, à Jérusalem. La maman est ravie, la petite fille bien sage, et les dons à l’occasion de la cérémonie sans doute bien abondants. Il le faut pour ornementer tous ces lieux de dévotion et entretenir les objets et les décors… Surabondants !
Trop pour moi, je préfère la simplicité et le dépouillement, bien plus sincères. Un autre angle de vue… Alors sortons du domaine religieux, et partons visiter deux autres lieux patrimoniaux et historiques.
Des lieux de souvenir
L’histoire de la Palestine, avant d’être celle d’Israël, est longue et compliquée. Une visite au Mur Occidental, enrichie par la présentation dynamique d’un guide cette fois souriant et disponible, nous avait présenté l’histoire de l’Esplanade des Mosquées et du Temple de Salomon. A la suite de celle-ci une visite au Musée d’Israël se révèle bien pertinente, quand on peut découvrir la maquette géante du temple dans son environnement. Le gigantisme de ce monument disparu laisse pantois et permet, un peu, de comprendre la nostalgie que ressentent les juifs en évoquant ce passé glorieux.
Ce musée est splendide, en particulier le Sanctuaire du Livre, dont l’architecture m’a emballé . Descendons quelques marches, et dans cet espace impressionnant penchons-nous sur les manuscrits de la Mer Morte, découverts sur le site de Qumran.
Le sanctuaire est enterré, pour faciliter la conservation des précieux manuscrits. Ils ont traversé les siècles dans des conditions de conservation extraordinaires, leur consultation aux temps modernes requiert une attention toute particulière.
Dans un autre registre, bien plus triste, Yad Vashem, l’Institut international pour la mémoire de la Shoah. Une très belle architecture encore, des expositions saisissantes, des objets évocateurs et des images désespérantes, prégnantes… Même en sachant ce que l’on va voir, on est pris aux tripes. Alors, pour illustrer cet article sous un autre angle, une seule photo, qui unit le jardin et le musée.
On en ressort un peu sonné, d’autant que la foule est très dense à l’intérieur, ce qui rend la visite oppressante. Remontons à la surface, allons prendre l’air.
C’est ce que nous avons fait le dernier jour, avant de reprendre l’avion, fatigués mais heureux, en visitant Jaffa, toute proche de Tel-Aviv
Israël n’est ni occidental, ni moyen-oriental
Israël n’est ni occidental, ni moyen-oriental. C’est à la fois une anomalie politique, un pays en pleine ébullition, un sanctuaire qui vu sous un autre angle devrait rassembler et non séparer. On peut rêver…
En tout cas, le contraste entre la modernité et l’agressivité d’un côté, et le patrimoine et l’histoire de l’autre, donne à réfléchir. Il faut digérer tout cela, en tirer des leçons permettant de voir notre monde sous un autre angle. Je vais prendre le temps de le faire…
Et peut-être un jour prendrai-je le temps d’étoffer cet article pour en faire un reportage plus complet. A suivre, merci de m’avoir lu !